CHAPITRE VI : PETITS PORTRAITS DE RENNES EN FETE
20. Le barbecue géant
 
 
        L’autre dimanche, aux Champs-manceaux, le barbecue géant n’a pas eu lieu. On a mangé un repas froid, précédé d’un apéro avec chants de marins. C’était très bien aussi.
        Le problème du barbecue géant, c’est qu’il faut demander aux employés municipaux de venir descendre la grille. En effet il s’agit d’un barbecue amovible. En temps ordinaire, les jours de pluie, par exemple, et il y en a beaucoup à Rennes, la grille est verticale. Pour les jours de fête, style banquet de fin d’album des aventures d’Astérix, on abaisse la grille qui vient se poser sur deux plots de béton. 
        Il ne reste plus alors qu’à allumer le feu par-dessous et à déposer ses sangliers, côtelettes de vache folle, gigots de moutons fiévreux, aiguillettes de poulets givré ou plus simplement galettes, saucisses et merghez. Vous faites alors rissoler, griller, embaumer, enfumer le quartier mais bon, je ne vais pas vous faire un dessin, vous savez comment ça marche, le barbecue.
 
        Le barbecue des Champs manceaux est tellement grand qu’il peut servir aussi aux feux de la Saint-Jean. Ici, en Bretagne, enfin en Presque-Bretagne, quand arrive la fin du mois de juin, dans toutes les administrations, on prend tous les papiers qui traînent sur le bureau du chef et on en fait de grands feux de joie autour desquels toutes les générations se rassemblent avec musique, biniou, galettes, saucisses, sangliers, etc. A un moment donné de la fête, les jeunes gens sautent par-dessus le feu, surtout les filles avec leurs longues robes de Gitanes qui ressemblent tellement à celles que portaient leurs mères aux alentours de mai 1968. 
        Celles d’entre elles qui, en sautant dans les flammes, n’attrapent pas le feu au cul sont considérées comme pas encore bonnes à marier et doivent se rendre au mois de juillet suivant en pèlerinage sur la plage de Saint-Guirec  à Perros pour une séance de rattrapage en forme de stage de piercing : elles tâcheront en effet de planter des aiguilles à coudre dans le nez en pierre du pauvre saint qui n’a rien demandé à personne.
 
        Tout ceci est véridique, même si cela laisse un peu l’impression qu’ici, en Bretagne et en Presque-Bretagne, les gens ont des mœurs un peu bizarres. Pour en revenir aux gens des Champs manceaux, il faut signaler qu’ils ne se servent même pas du barbecue géant pour les feux de la Saint-Jean. En effet, comme les jeunes filles qui sautent portent des talons aiguilles, il arrive que certaines se prennent le pied dans les trous de la grille, ce qui les fait chuter et occasionne parfois, en plus des bleus, de graves brûlures, ce qui ne les aide pas vraiment par la suite à trouver un mari. Ce barbecue est trop dangereux, en fait. 
 
        Un qui n’est pas dangereux du tout, malgré l’annonce qu’on en a faite dans « l’Echo des Champs manceaux », c’est le pyranhosaure. On nous en avait dit pis que pendre, mais comme vous pouvez le voir sur la photo prise au mépris du danger et en contrevenant à l’interdiction formelle de photographier la bête, il ne s’agit que d’un vulgaire poisson rouge ! 

        Ils m’ont l’air d’être de sacrés farceurs, aux Champs manceaux. Il faut dire aussi, à la décharge du Comité d’animation du quartier, que ce dimanche là, c’était le 1er avril.   

 
P.S . Aux dernières nouvelles, il ne s’agirait nullement d’un barbecue géant mais d’un podium amovible installé là par la municipalité pour permettre des fêtes de quartier. Comme quoi, ici en Bretagne, ou en Presque-Bretagne, il ne faut jamais se fier aux apparences.
 
 
 
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