Il y avait autrefois, dans la ville de Condate, un jardinier très
pauvre mais qui était aussi très ingénieux. On l’avait
surnommé Furlukin bien qu’en fait il s’appelât Denez.
Denez Furlukin était plein d’attentions pour le jardin dont il avait à s’occuper. Un jour il s’aperçut que ses légumes poussaient plus vite et devenaient plus gros si on prenait le soin de leur chanter une chanson le soir avant de les laisser dans le froid de la nuit. |
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Comme il connaissait la musique et jouait du luth gréco-romain,
un instrument celtique de l’époque, Denez Furlukin se mit à
exécuter quelques gigues le soir dans son jardin avant de s’en aller
traîner dans la rue Saint-Michel où étaient, et où
sont toujours les plus fameuses tavernes de Condate.
C’est ainsi que se mirent à pousser, sur son petit lopin de terre, des radis géants. Jamais on n’avait vu auparavant en ce bas monde d’aussi énormes radis. Ils mesuraient bien deux mètres de hauteur et pesaient au moins trente kilos chacun leur tour. Oui, oui, chacun leur tour car il n’en pouvait pousser qu’un seul par jour. Mais bon, un radis de trente kilos, découpé en rondelles et vendu au marché des Lices, ça lui rapportait gros, au Denez Furlukin. De quoi pouvoir aller, le soir venu, dans la rue Saint-Michel fréquenter les tavernes avec ses compagnons de fortune. |
Comme il était plein de ressources Furlukin décida de surprendre
son voleur. Furlukin se cacha dans un coin du jardin et attendit la nuit
afin de prendre son voleur-croqueur sur le fait. Et de fait, il la prit
la main dans le sac. Car c’était une voleuse.
- Vous, Mademoiselle Isaure
? Est-ce bien vous qui faites disparaître mes radis ?
- Excusez-moi, damoiseau Furlukin mais c’est mon médecin qui m’a conseillé d’en manger afin que disparaisse mon teint bleuâtre. Et vos radis géants sont si jolis, si appétissants, si savoureux… Je n’ai pas pu résister quand je les ai vus. Voilà pourquoi je sors de mon palais la nuit pour venir en croquer et… Vous savez ce qu’est la gourmandise chez les jeunes filles... Une fois qu’on a commencé, on ne peut plus s’arrêter. |
Bien qu’elle eût été mise en garde par le gentil Furlukin,
la demoiselle Isaure ne put s’empêcher de revenir toutes les nuits
pour croquer du radis. Certes son teint s’améliora, sa peau devint
blanche, puis rose, toute rose, très rose et… Et rose elle a vécu
ce que vivent les roses : un jour elle disparut. Purement et simplement.
Complètement. Elle disparut.
Car ce radis géant, son effet secondaire, c’était bien celui-là : il faisait disparaître celui ou celle qui abusait de sa consommation. Un radis comme la vie, quoi. |
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P.S. Message personnel à Ar Furlukin
: ce n'est pas moi qui ai dérobé ton radis géant !
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