Entre le 21 avril et le 5 mai 2002, même ici à Rennes en Bretagne,
la capitale de l'Intelligence, il ne faisait pas bon être étranger
ou étrangère. Au cours d'un dimanche formidablement ensoleillé,
20% des Français avaient fait le choix d'accorder leurs suffrages
à l'extrême droite aux élections présidentielles.
Moi-même, j'ai préparé ma valise. Mes valises. En trois ans et un mois de vie rennaise, j'en ai amassé, des souvenirs ! Ils sont venus se superposer à d'autres, formant par-dessus le gâteau de mon existence une couche plus colorée peut-être, plus chaleureuse sûrement, plus humaine toujours. |
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Et devant la pile des "Rennais" posée au bas de mon armoire, il
a bien fallu me résoudre. Je n'emporterai pas ces numéros
du bulletin d'information de la ville de Rennes. Trop lourds, trop encombrants.
Mais pourtant, que de joies, que d'images, que de moments vécus
sont là annoncés, relatés, illustrés.
Alors, histoire de ne pas tout perdre, je me suis attelée au découpage.
Maintenant les trois ans de Rennais tiennent dans une enveloppe. Plus tard,
une fois rentrée au pays, je la retrouverai, je ressortirai et contemplerai
à nouveau ces photos découpées à la hâte.
Celle de Roland Becker teintera de sépia ma nouvelle nostalgie des Tombées de la Nuit. |
La jeune fille au livre rouge me contera à nouveau les mystères du Musée des beaux-arts, les beautés de la Bretagne ; elle sera peut-être, si j'écris un jour mon histoire, ma "muse bretonne". |
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Le chien, innocent, sympathique, en attente de caresse, me fera penser à la ménagerie des Deschamps vus sur la scène du TNB l'année dernière. En France, désormais, les animaux sont savants mais les gens sont fous. |
La photo signée Dominique Levasseur montre un canon à confettis un beau jour de printemps avec la rotonde de l'opéra en arrière-plan. L'heure n'est plus au carnaval sur la place de la mairie. Et pourtant, des souvenirs, sur cette place, qu'est-ce qu'on a pu en partager ! |
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Dans l'enveloppe, j'ai mis le marque-pages du spectacle de l'Arpenteur
: "la Lettre au père" de Franz Kafka. On peut lire au recto : "Les
livres devraient rester sans surveillance dans des endroits publics pour
ses déplacer avec les passants qui les emporteraient un moment avec
eux".
"…Avant qu'on ne les brûle à nouveau" suis-je fort tentée d'ajouter. Les deux images suivantes ne m'évoquent rien de personnel. Mais l'une, à cause de la profondeur du regard, l'autre pour ce grand rire si humain, sous des formes bien différentes me semblent symboliser une tradition colorée et une modernité chatoyante. On peut rêver. |
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Isaure
- Qu'est-ce
que vous fichez encore avec vos valises, mademoiselle Chasserio ?
- Je
m'en vais, monsieur Krapov. Je retourne dans mon pays.
- Ne
dites pas de conneries. L'Italie est dirigée par Berlusconi. C'est
là-bas qu'ils sont au pouvoir, les fascistes. Allez, grouillez-vous
le cul, vous allez nous foutre en retard pour la manif du 1er mai.