LES PETITS PLAISIRS RENNAIS
11. Les djeunns, Jean-Emile et les Fragonard
 
 
      Le vieux monsieur a mis son auto dans le bateau. Il faisait beau. La traversée vers l’île de Groix a duré trois quarts d’heure. La deux chevaux a ensuite péniblement monté la côte de Port-Tudy. Jean-Emile Rabatjoie a traversé le bourg, tourné à droite et arrêté la deuche devant son coin de paradis. 

       La maison est bleue, la terrasse donne sur la mer. Il a sorti du coffre sa caisse de journaux découpés, ses revues d’art, sa paire de ciseaux pointus et son stick de colle. 

 
        Depuis, sur la terrasse ou dans le salon, il coupe, il ajuste et il colle. Quand il en a assez, il va marcher dans l’île, il redescend au port regarder les bateaux, assis à la terrasse du bar devant un apéro. 
 
 
          Les trois djeunns ont tout d’abord tourné autour de la 2CV.
- Elle vous plaît ? a demandé Jean-Emile.
- Elle est bien entretenue, en tous les cas ! Vous êtes le nouveau locataire ?
- Non, je suis le nouveau propriétaire. La maison m’appartient, je l’ai achetée cet hiver. Et vous, vous êtes en vacances ?
- Oui, nous sommes vos voisins. On habite la maison d’à côté.

        Les trois djeunns avaient de bonnes têtes. Jean-Emile les a invités à prendre l’apéro le soir. Ils ont découvert qu’ils habitaient Rennes tous les quatre. A la fin de la soirée Anne, Katia et Jean-Paul appelaient Jean-Emile « Papy ».
 

 
        Le lendemain, il leur a montré ses collages.
- C’est original ! a dit Jean-Paul
- C’est inattendu ! a dit Katia
- C’est drôle ! a dit Anne
- J’ai juste un problème : cette tête-là, elle va sur les trois mais je n’en ai qu’un exemplaire.
- C’est qui cette bimbo-là ?
- C’est Dalida, la chanteuse. C’est une pub que j’ai découpée dans un vieux Télérama.
- Si tu veux, Papy, je te la scanne et je te la printe. J’ai tout le matos à côté. Ca peut le faire très vite même.
- Tu me la quoi ? Ca va pas l’abîmer, au moins ?
- Je t’en fais une repro si tu préfères. Passe moi ton image. On va se baigner aux Grands sables et on repasse dans la soirée.
- Tu la perds surtout pas, hein, j’ai que celle-là !
 
 
 
image empruntée à l'atelier d'écriture 2001 de Télérama.fr 
      Les revoilà. Ils sont passés par la terrasse. Ils ont à la main, chacun, chacune, une effigie de Dalida qu’ils brandissent comme un trophée. 

- Eh ben c’est mon copain Jacques-Henri qui va être content de ces Fragonard là ! Jacques-Henri, c’est celui qui met mes collages sur l’internénette. Il a appelé ça le MIR. Le Musée Iconoclaste Rennais ! 
- Si tu veux, Papy, on peut scanner tes collages et les lui envoyer par mail. 

- Ca va pas les abîmer au moins de les passer dans ta moulinette électrique ?
- Mais non Papy. Allez, reprends donc un coup de blanc ! A la santé de Fragonard !
- Et de Dalida !
- Et de Darla Dirla Dada !
- A nos vacances à Groix, les djeunns !
 
P.S. Grâce à la magie d’Internet, la galerie des « Fragonard toi-même » est en ligne !
 
 
Retour au menu de 
Rennes en délires
Retour au menu des 
Petits plaisirs
 
Précédent
Suivant