LES
PETITS PLAISIRS RENNAIS
6.
Aux marches du palais
- Monsieur
le président ! Quelle longueur ! Vous m'étonnez !
- Pas
mal, hein, Monica ? Et puis... quelle élégance.
- Vous
êtes sûr que vous n'avez pas un peu triché ?
- Voyons,
Monica... Bon peut-être. C'est très à la mode en ce
moment ce format là. Le style panoramique, même avec les jetables.
Alors... peut-être qu'ils ont trafiqué un peu la photo !
- Je
me disais aussi, aussi long, ça ne peut pas exister.
- Je
vous assure que c'est quand même pas mal, en vrai. Et puis il y avait
un grand soleil... |
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- Est-ce
que c'est bien sérieux, quand même, de trafiquer ainsi l'image
d'une abbaye ? C'est un petit peu iconoclaste non ?
- Mais
enfin, Monica, je ne vous ai pas dit ? Ce n'est plus une abbaye, c'est
une caserne de pompiers !
- Une
caserne de quoi ?
- Une
caserne de pompiers ! Les pompiers, ceux qui éteignent le feu !
Vous savez, à Rennes, ce n'est pas plus mal qu'ils soient en centre
ville. Avec toutes ces maisons à pans de bois. Il suffit d'une pipe
mal éteinte comme en 1720 et hop, c'est reparti comme en 94.
- Monsieur
le président, vous ne devriez pas rire avec l'incendie du Parlement
de Bretagne.
- C'est
vrai Monica, mais moi, vous savez, la Justice... Les palais de justice.
Enfin la Justice et moi...
- On
se met au travail, monsieur le Président ?
- Non
attendez, je ne vous ai pas tout dit. Vous savez, ça m'a fait vraiment
très plaisir de retourner à Rennes. Marcher dans cette ville
c'était un vrai bonheur, même s'il faisait un peu froid, que
le vent soufflait et que les nuages, quelquefois, cachaient le soleil.
- Eh
bien ?
- Ca
m'a rajeuni, Monica. Je suis retourné au Saint-Georges. Il existe
encore ce café. Il n'a pas changé.
- Monsieur
le Président, nous avons de nombreux rendez-vous encore, ce matin.
- C'est
bon, Monica, faites entrer le premier de ces messieurs.
***
Le président
rêvasse. Quand on sort de la gare, par beau temps, tout au bout de
l'avenue Janvier on voit le palais Saint-Georges qui resplendit. Les jardins
sont de toute beauté et avant de traverser la Vilaine on laisse
sur sa gauche le Musée des Beaux-Arts de Rennes où sommeille
un tableau signé Amaury-Duval.
Il représente la même jeune fille que celle qui lui fait face
quand aucun visiteur n'occupe le siège en face de lui : elle s'appelle
Isaure Chassériau. Dans le bureau du président, le tableau
porte une autre signature : on peut lire, en regardant bien, quelque chose
qui ressemble à "Th. Chassériau".
Plus loin, dans le port d'Amsterdam, y'a des marins qui boivent et qui
boivent et reboivent et qui reboivent encore.