LES PETITS PLAISIRS RENNAIS
4. Une matinée chez le président
 
Ce texte fait suite à L'Amaryllis
 
-Monica !
- Oui, monsieur le Président ?
- Monica… Montrez-le moi encore !
- Oh, monsieur le Président, vous exagérez !
- Allez, Monica… Juste encore un petit peu… Je vous en supplie
- Vous êtes totalement surbooké ce matin, monsieur le Président. Des rendez-vous à n'en plus finir. Et vous allez perdre votre temps à des bagatelles !
- C'est… C'est un ordre, Monica ! Où est-ce qu'il est ?
- Mettez la main là.
- Sur le mulot ?
- Ca s'appelle une souris, monsieur le Président.
- Et puis ?
- Vous amenez la flèche sur le gouvernail et vous cliquez.
- OK. Et maintenant ?
- Vous cliquez sur "à suivre"… et maintenant sur "nouveau".
- Ah Monica ! Vraiment… vraiment ! Il est superbe ! Qu'est-ce qu'il est beau !
 
***

- Monsieur le Président, les deux détectives sont là. L'affaire Chassériau, vous vous souvenez ? Le tableau et la jeune fille qui ont disparu du Musée des Beaux-Arts de Rennes.
- Faites les entrer, Monica. Comment s'appellent-ils déjà?
- Mick Mac Cormick et Dick Dracy.
 

***

- Alors messieurs, comment va la bonne ville de Rennes ?
- Bien, monsieur le Président, très bien même. Nous avons beaucoup progressé et mis la main sur une de vos anciennes connaissances.
- Jean-Eudes Mirliton en personne. Nous l'avons un peu malmené pour le faire parler, mais ça valait le coup.
- Nous avons du nouveau, monsieur le Président.
- Cela s'appelle Internet. C'est un nouveau système de communication utilisé par des membres de plusieurs sectes.
- C'est un truc ahurissant : on y accède de partout à partir d'un simple ordinateur de modèle courant.
- Les gens peuvent même s'écrire des lettres avec ça. Communiquer gratuitement ! C'est fou, non ? Si ça continue comme ça, on n'aura même plus besoin de La Poste !
- De toute façon, à Rennes en ce moment, la Poste n'arrête pas d'être en grève. Finalement….
- Vous voulez bien revenir à l'enquête, messieurs ? J'ai de nombreux rendez-vous ce matin. Vous pouvez quitter votre déguisement si vous voulez, monsieur Mac Cormick.
- Mon déguisement ? Quel déguisement ?
- Cet imperméable d'inspecteur Colombo et ces lunettes d'écailles… Ce n'est pas un déguisement ? Bon, passons, je n'ai rien dit. Vous n'avez pas eu la main trop lourde avec Mirliton ?
- Vous savez, nos méthodes parfois sont un peu… brutales. Mais bon, on est détectives privés, pas enfants de chœur. On les a juste un peu assommés les deux types.
- Les deux types ? Qui était le deuxième.
- Une espèce de fouille-merde. Un détective privé. Un certain Florent.
- Connais pas. Et que me ramenez-vous pour finir.
- Tout est sur ces disquettes, monsieur le Président. Ce sont les signets de son navigateur. Avec notamment un lien vers un site appelé "Rennes en délires".
- Un truc ahurissant ! Un roman gratuit sur Internet !
- La gestionnaire du site, une certaine Mme Crapovna, n'a même pas prévu d'impressions payantes de ses pages !
- Complètement utopique ! Mais complètement subversif aussi. Vous imaginez, il y a dans toutes les entreprises de France plein de gens qui, sur leur temps de travail, vont surfer sur des sites tout aussi futiles !
- Quelle perte pour l'économie !
- Heureusement qu'on va instaurer les 35 heures. Les pertes de productivité occasionnées par ces surfs diminueront ainsi.
- En fait, on ferait mieux d'interdire Internet.
- Surtout la messagerie !
- C'est bon messieurs. Vous pouvez retourner à votre enquête. Je vais regarder cette disquette. Tenez-moi au courant de la suite.
 

***
 
- Monica !
- Oui, monsieur le Président ?
- Je ne retrouve plus le Parlement !
- Encore ? Dans la barre des tâches, monsieur le Président, vous l'aviez iconisé. Avant que j'introduise les deux détectives.
- Oh la la ! Qu'est-ce qu'il est beau ! Superbe. Elle a eu raison d'appeler sa page "hypnose". C'est vraiment hallucinant. Ce truc, on ne s'en lasse pas. Finalement, Monica… C'est assez fabuleux, Internet !
- Vous savez, monsieur le Président… Il n'y a pas qu'Internet dans la vie.
- Quand même, Monica, quand même ! Ah au fait, Monica…
- Oui monsieur le Président.
- Rangez-moi cette disquette avec les autres… dans la boîte de cigares "Pharaon".
 
 
 
 
 
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