LES PETITS PLAISIRS RENNAIS
1. Les cours de récréation
 

        Au siècle dernier, c'est-à-dire il y a un an, au début de 1999, un samedi par mois, je prenais des cours de récréation. Nous étions à vrai dire plusieurs dans ce cas-là qui montions intrigués ou anxieux les marches du petit perron.

        Serions-nous à la hauteur, cette fois-ci ? Il y avait un maître à nos jeux et de l'ordre dans nos délires : une fois lancés, tranquillement assis, nous voyagions, nous divaguions. Nous inventions ensemble quelque chose d'invisible, un projet d'enfants fous constitué d'images et de scénarios étonnants.

        Il y avait des histoires d'amour fou à un arrêt de bus, des fleurs qui parlent aux gens dans un jardin public, une librairie cruelle qui ne sévit que la nuit, des tableaux qui changent de couleurs, des jeunes mariées qui grimpent en haut de la grande échelle du camion des pompiers, des animaux du zoo qui s'endorment dans un manège…

        Tous ces jeux avaient lieu dans le plus grand silence. Les plumes grattaient le papier, les esprits voyageaient, l'atelier bourdonnait comme une ruche. Il s'agissait de construire le "guide de la ville invisible".

        Nous avions beau donner libre cours à notre imagination, nous restions quand même toujours très studieux. Tout cela avait beau se passer dans un théâtre, nous le savions très
bien : en matière de récréation, nous n'étions que des amateurs.

        Les comédiens qui nous accueillaient passaient eux toute leur vie à jouer alors que nous, dès le lundi matin, nous retournions au turbin. Et d'ailleurs, au Théâtre de l'Arpenteur, c'étaient vraiment des professionnels de la pelle et du seau : dans leur salle de spectacle, dans un grand bac à sable, ils avaient construit une ville… visible !
 

 
 
 
 
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