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“Rennes-en-délires”
: un atelier d’écriture sur le web rennais
Écriture en tête pour un
site d’arpenteur du verbe et de l’urbanité
Bibliothécaire de son métier, Jean-Paul
Legrand est un fondu d’écriture, un vrai mordu du verbe libre.
Cette passion personnelle pour la création textuelle, relayée
par une longue fréquentation des ateliers d’écriture, l’a
naturellement conduit à prolonger ses expériences sur internet.
Il y arrive par le biais de son travail en participant à la création
d’un site web. Il monte des pages html, apprend les rudiments techniques
et se lance ensuite dans quelque chose de plus ludique. De plus personnel,
aussi. De ses voyages sur le net, il ramène un site de Radio-France,
les “parvis poétiques”, qui profite des internautes pour créer
en ligne des textes littéraires. L’idée fait son chemin.
Arrivé à Rennes il y a trois ans, c’est une suite d’expériences
qui vont finalement le conduire peu à peu à la création
du site littéraire “Rennes-en-délires”.
“Il m’a semblé intéressant d’aborder
la ville par ce biais de l’écriture
et de la photographie. Cela prolonge deux expériences
que j’avais pu faire auparavant. D’abord, cet atelier d’écriture
lancé par Télérama en 1998 à partir de photos.
L’internaute déposait sa nouvelle sur le site avant que la rédaction
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ne fasse un choix pour la publication dans le magazine.
Puis, il y a eu cet autre atelier d’écriture autour d’un travail
du théâtre de l’Arpenteur qui avait finalement donné
naissance au spectacle, puis au livre, “Guide de la Ville Invisible”. Le
projet d’Hervé Lelardoux était d’affirmer qu’il y avait une
ville invisible que chacun porte en soi, avec ses trajets, ses souvenirs,
ses relations particulières avec des lieux. Le projet était
de rassembler tout ça en sept chapitres thématiques et en
fonction des lieux de Rennes. J’ai prolongé cette expérience
en l’ouvrant au net, en essayant de faire quelque chose de plus drôle
et de plus ludique.C’est la synthèse de ces deux ateliers qui a
donné naissance à “Rennes-en-délires”.
“Rennes-en-délires” est à la
fois un site perso et communautaire,
que j’anime avec l’énigmatique Joe Krapov.
Il fonctionne entièrement comme un atelier d’écriture, puisqu’il
y a des propositions d’écriture sur des endroits de Rennes, à
partir de jeux, de photos, de tableaux… Mais, il s’agit vraiment de littérature
interactive puisque chacun peut apporter sa pierre textuelle à ce
gros édifice. Les gens envoient des textes, choisissent un des quinze
chapitres, une des quinze pistes proposées pour écrire.
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Ce mois-ci, le chapitre que nous proposons concerne
les bistrots, en liaison avec des séances de l’Atelier d’Ecriture
de Villejean auquel je participe. Nous avions visité trois ou quatre
bars différents pour y écrire. Nous étions heureux
de voir la “richesse”, modestement, de ce que nous avions ramené
de ces situations “en contexte”. Il y avait un travail sur les cartes postales,
au “Café de la Poste” bien sûr ; un autre au bar “le Flandres”
avenue Winston Churchill à Villejean, avec son histoire particulière
et tous les souvenirs des clients qui ont suivis l’évolution du
quartier. Ce sont des endroits qui vous emmènent “ailleurs”. J’en
ai profité pour y introduire les aventures d’un détective
privé, engagé par le Musée pour rechercher le personnage
d’Isaure Chassériau qui a disparu de son tableau. Mais, le personnage
passe son temps à traîner son enquête de bar en bar,
à écrire des rapports à son associé pour lui
dire que rien n’avance.”
Il faut absolument prendre le temps de naviguer
dans le site, de suivre l’évolution des chapitres, de tourner
les pages de cette longue suite de textes dédiés à
Rennes. Par exemple, ces “Notes de parcours de P’tit Louis” qui racontent
le voyage d’un arpenteur sur le bitume de la Rue de l’Alma.
“C’est un des derniers textes que j’ai mis
en ligne…
Il part
d’une idée : il y a une rue de l’Alma à
Rennes, il y a le Pont de l’Alma à Paris, avec sa statue du Zouave
qui sert à mesurer les crues de la Seine. Je ne connaissais pas
cette longue rue, moi qui vis à Villejean et qui ai surtout exploré
la zone-nord de la ville. J’ai donc cherché ce Zouave tout au long
de la chaussée. Je suis tombé notamment sur cette étonnante
porte de garage multicolore et finalement sur l’enseigne des Restos du
Cœur … C’est donc peut-être Coluche, ce Zouave invisible de la rue
de l’Alma ? Je me suis promené au long du boulevard de la Tour d’Auvergne
où tout le monde m’avait dit qu’il n’y avait rien à voir,
à part un pont et une caserne. Mais, je suis revenu avec cinq pages
et des photos ! Donc, même sur le parcours du Rien, il y a des choses
à voir, à découvrir si on garde le nez en l’air et
qu’on prend le temps de regarder !”
Si l’atelier d’écriture est un vieux procédé
de mise en commun de la pratique littéraire, son prolongement
via Internet ouvre des voies nouvelles, notamment au niveau de la vitesse
et de l’ouverture géographique. “Dans les surprises interactives
du site : c’est le chapitre “poésie” qui s’est le plus enrichi des
contributions des internautes ! Les gens écrivent et envoient donc
des poèmes, comme s’il y avait une sensibilité particulière
de Rennes ou de la Bretagne à cette forme littéraire. Les
visiteurs viennent du monde entier, signent le livre d’or pour laisser
une trace de leur passage. Comme les messages de ce Rennais qui vit en
Pologne. Cela prouve que la démarche intéresse, trouve une
utilité en apportant quelque chose à des gens. Mon seul regret
est de ne pas avoir encore de retours d’enseignants, qui pourraient pourtant
se servir du site pour leurs élèves.”
goulven
hamel
Biblio : “Rennes - Guide de la Ville invisible”
(1999) - édition Terre de Brume / Théâtre de l’Arpenteur
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www.rennes-en-delires.com
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