CHAPITRE XVIII : DES PARCOURS A N'EN PLUS FINIR
11, Rue de Rennes à Paris
 
 
- Mais moi j’existe ! 

         Voilà ce qu’elle semble dire, la rue de Rennes, à Paris, ce mardi 11 septembre 2001. Voilà ce qu’elle semble répondre à la rue de Paris, à Rennes, celle qui serpente doucement entre les pelouses du Thabor et les hôtels particuliers construits au-dessus de la Vilaine. 
 

 
 
  
- Mais moi j’existe ! 

        Et Isabelle semble l’entendre cette phrase. Du moins c’est ce qu’elle perçoit du quartier Montparnasse au sortir de son stage de formation au logiciel informatique WINIBW. Car entre la rue de Rennes et la rue Spontini il n’y apas photo. Là-bas, dans le seizième, à côté de l’hôtel Saint-James et du siège social de Péchiney, entre les résidences modernes protégées par des grilles et les grandes maisons bourgeoises du XIXe siècle, là-bas, au pays des entrées de service et des portes avec mascaron, parmi les heurtoirs neufs, prétentieux, scintillants, inutiles, là-bas où l’on ne croise personne d’autre que des policiers faisant le pied de grue à l’entrée des ambassades des pays d’Afrique et d’Asie, là-bas, dans ce monde du fric et de la tranquillité protégée, elle n’a pas l’impression d’exister, elle non plus.

 
        La rue de Rennes, par contre, avec sa banque Hervet , sa plaque commémorative  
« Ici a vécu Hélène Boucher », avec ses enseignes qui font écho à des lieux rennais, la rue de Rennes existe et elle réjouit Isabelle. Ici, à Paris, rue de Rennes, l’Arvor est par exemple un café-bar-tabac… à vendre.
 
        A la vitrine des magasins, on peut lire « un dimanche à la 
mer »  « une femme à Paris » « Reflets d’Orient », « Orlando 
curioso »  « Tintoretto », « Il était une fois », « Lulu Castagnette »…
 
        Les mascarons au-dessus des portes représentent plus souvent qu’à leur tour des animaux. Il y a même, à côté du cinéma Arlequin, qui s’appelait jadis le Cosmos, un dragon médiéval. Plus loin, une fois traversé le boulevard Saint-Germain, elle découvre, dans la rue Bonaparte, une incroyable licorne.
 
        Elle n’a pas pu résister. Elle est allée au bout de la rue et s’est retrouvée quai Conti, pas loin de l’Institut de France. C’est qu’elle a habité là, Isabelle, jadis. La nostalgie, toujours… 

        Le vendredi suivant, elle a refait tout le parcours en photographiant les points intéressants. Elle a même fixé sur la pellicule cette plaque de rue au nom si symbolique : rue du Regard.

 
        La rue du Regard est partout. Elle mène de Rennes à Paris, de Venise à Prague, de Saint-Sulpice-la-Forêt à Langon-les-Douze-clochers. 

        La rue du Regard nous appelle. Elle sussure toujours à l’oreille : 
- Viens voir…

 
 
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