Un appartement luxueux. Au-dessus du micro-ordinateur dernier cri un grand
poster représentant le cargo Karaboudjan. L'homme est seul, debout
dans le grand salon aux murs blancs, à la baie vitrée lumineuse.
Il semble hésiter, tourne en rond autour de la petite table basse
sur laquelle est posé un coussin de velours violet. A côté
du coussin, dans une coupe en cristal de Bohême, des abricots dorés,
mordorés, charnus et voluptueux à souhait
- Mon dieu, songe-t-il, si j'y vais maintenant, c'est peut-être un peu tard. Elle ne va pas tarder à rentrer de son jogging. Et si elle me surprend sur le site… |
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- Ce n'est pas le tout d'y accéder. Par Altavista je trouverai forcément l'adresse, même si je dois me farcir l'"Aubade à Lydie en do" de Bobi Lapointe. Mais c'est pour sortir. Parfois c'est tellement long d'iconiser ou bien d'attendre l'affichage des images de grande taille. Bon tant pis, je prends le risque, j'y vais.
Il s'installe alors rapidement devant l'ordinateur, l'allume, attend le chargement des différents modules et une fois que monsieur Norton, l'antivirus, a fait son petit tour du propriétaire, il clique sur le phare de Communicator, va chercher Altavista dans ses signets, tape "aubade" et sélectionne "french".
Et bien entendu, quelques secondes après, lorsqu'il a affiché la leçon n° 30 (lui tendre une embuscade), Sonia fait dans la pièce une entrée fracassante.
- Jean-Eudes
! Jean-Eudes ! Balthazar est blessé. Il s'est planté une
épine dans la patte. Donne-moi les clés de la voiture, je
l'emmène chez le vétérinaire !"
- Mais,
Sonia chérie, peut-être qu'avec une pince à épiler
ou un coupe-ongles on arriverait à l'enlever cette épine
?
- Un
coupe-ongles ! N'importe quoi, mon ami. Et puis je ne vais quand même
pas charcuter notre lévrier afghan sur la moquette de ce séjour,
regarde la pauvre bête, elle ne peut même plus avancer. File
moi les clés, te dis-je. Allez viens Balthazar !
Elle disparaît aussi subrepticement qu'elle est venue. Tout retombe
dans un grand silence d'après la tempête. Pendant tout le
temps qu'elle a été là, il est resté debout
devant l'écran, cachant de son grand corps élégant
le cours de séduction en trente trois leçons délivrées
sans façons aux volcans tout comme aux glaçons.
Il pousse un grand soupir, se détend, va prendre un abricot dans la coupe. Il se remet devant l'ordinateur, regarde la peau dans la dentelle, puis, délicieusement, savourant lentement toute la suavité du plaisir, il mord dans la chair du fruit… défendu. |
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Ecrit par Jean-Paul le 9-11-1999. La consigne était de relier deux photos, celle d'un élégant jeune homme et celle d'un abricot posé sur un coussin de velours (Quelle relation entre ce prince moderne et ce velouté de fruit divinement présenté ?) et d'introduire dans l'histoire le plus grand nombre possible d'éléments suivants : un coupe-ongles, un vétérinaire, des tergiversations, un sentiment de jalousie, un cargo, Internet.
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