Elle pose doucement son regard sur moi... noir comme celui d’un fantôme torturé par la culpabilité. Son visage est doux comme un fromage fondant et poreux, ses rides sont celles d’une femme de 80 ans, ses cheveux d’une jeune fille de 15 ans.
Doucement, comme si le sol caressait ses pieds, elle s’approche de moi.
Lorsque ses fesses touchent la chaise, il n’y a pas un bruit autour. Elle
me regarde comme si elle voulait me tuer, elle passe sa langue sur ses
lèvres :
Ma voix virant dans les aigus contraste singulièrement avec son ton affirmatif. - Et pourtant vous êtes
pas si laid, c’est juste que je serais incapable de vous faire l’amour
! dit elle avec un sourire triste.
D’un coup elle finit son verre de vin rouge, puis brusquement se relève, pose les deux mains sur la table en me regardant directement sans cligner. - Est-ce que j’vous ai demandé un conseil, est-c’que j’vous ai demandé quoiqu’ce soit ! Pour moi, y a pas d’avenir, pas de descendance, pas de place... Y a juste l’éternité qui m’attend et je préfère son lit au vôtre. Puis elle se rassoit. - Tu veux bien me repayer un autre verre ? Je continuai à écouter pendant toute la soirée ses délires et je ne savais toujours pas à qui j’avais affaire. Elle parlait comme un enfant des choses les plus tristes et riait de mes airs exorbités. A la fin de la soirée je ne la connaissais toujours pas, mais pourtant elle se sentit obligée de m’inviter chez elle, et j’avoue que je ne me fis pas prier, pour tous les verres que je lui avais payés. Et comme elle me faisait pitié, je décidai de faire de mon mieux sans trop m'attarder. |